3.12.07

L'aborder en plongée


(...) Ferrer ôte son tricot et retourne se coucher.
Facile à dire. Magnifiquement proportionnée, décidément, l'infirmière Brigitte n'en occupe pas moins la totalité de la couchette : plus de place pour y glisser ne serait-ce qu'un bras. Sous aucun angle on n'y peut accéder latéralement. N'écoutant que son courage, Ferrer choisit de l'aborder en plongée en s'étendant sur l'infirmière avec toute la délicatesse dont il dispose. Mais Brigitte commence à gémir désapprobativement. Elle se refuse et se débat au point que Ferrer pense un moment que c'est cuit mais, par bonheur et par paliers, l'infirmière finit par se détendre. On s'occupe et ne peut s'occuper qu'avec une marge de manoeuvre restreinte, l'étroitesse de la couchette interdisant plus de combinaisons qu'elle n'en permet : on ne peut se disposer que l'un sur l'autre, quoique alternativement et dans les deux sens, ce qui n'est déjà pas mal. On prend son temps vu que c'est dimanche, on s'attarde et ne sort de la cabine qu'à dix heures du matin.

Jean Echenoz, Je m'en vais, Editions de Minuit, 1999

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