27.5.11

les mères qui font comme il ne s'agissait pas d'elles en permanence


Le plus comique chez la plupart des gens c'est qu'il s'imaginent que cette vie est la seule qu'ils auront à vivre : ils la remplissent de panique, de souffrance, de mérite et de gloire. Ils prennent un oiseau de métal entre Los Angleles et New York, mais ils n'ont toujours pas compris l'essentiel : Dieu n'est pas au bureau et il ne répond pas au téléphone - pigé ? Vous ne serez pas sauvés, mes frères et soeurs, vous serez réaffectés. La seule personne que j'aie jamais vue qui se comportait comme s'il le savait, c'était Vince, qui dans une vie antérieure avait dû être pourceau dans la fange. Aucun de nous ne se souvient vraiment où il était. Nous ne savons pas. Il avait le rire facile, se donnait des claques sur sa grosse cuisse épaisse, mangeait des beignets et riait comme si chaque jour était un jour de congé, ce qui est le cas : nous sommes en congé d'être quelqu'un d'autre. Vince était le premier homme que je rencontrais qui n'était pas persuadé de se posséder.


Anrew O'Hagan, Vies et opinions de Maf le chien et de son amie Marilyn Monroe, Chritian Bourgois, 2010.

23.5.11

La cité blanche



"Si le vertige auquel je tiens comme à un attribut de ma qualité virait doucement vers plus de concision, plus de liberté, hors du harcèlement, on aurait un jour plus clair."


Nicolas de Staël, lettre à Jacques Dubourg, Antibes, décembre 1954, cité par Edith de la Héronnière in "Nicolas de Staël à Antibes", texte paru dans la N.R.F. n° 396 (janvier 1986) et repris dans Promenade parmi les tons Voisins, Editions Isolato, 2007.

18.5.11

on sait ce qu'on porte en soi



Le tableau c'est Guernica : à peine lève-t-on les yeux au-delà des pans de bitume qui signifient que la cité est là, qu'on se dit qu'on repartirait se coucher, ce qui serait bien mieux. Et pour autant on est quelqu'un de précieux, d'une nature positive, inventive, on sait ce qu'on porte en soi.

(...)

De vrais pères de famille, de vrais appartements parfaitement décorés. Ni la révolution ni la contestation, plutôt le regard d'un haut et très chancelant pudding fait de couches disparates.


Gérard Manset, Visage d'un dieu inca, Gallimard, coll. L'Arpenteur, 2011

10.5.11

et je ne vous quitterai pas


Nous ne serons jamais assez attentifs aux attitudes, à la cruauté, aux convulsions, aux inventions, aux blessures, à la beauté, aux jeux de cet enfant vivant près de nous avec ses trois mains, et qui se nomme le présent.

René Char, cité par François Mitterrand à l'occasion du colloque Création et développement à la Sorbonne, 13 février 1983.

7.5.11

Cent ans et plus



CZAR - Prononcer tzar et de temps en temps autocrate.
DIPLÔME - Signe de science. Ne prouve rien.
GUERRE - Tonner contre.
GULF STREAM - Ville célèbre de Norvège, nouvellement découverte.
HEUREUX - En parlant d'une homme heureux : "Il est né coiffé". On ne sait pas ce que cela signifie, et l'interlocuteur non plus.
LITTÉRATURE - Occupation des oisifs.
PARRAIN - Toujours le père du filleul.
PHÉNIX - Beau nom pour une compagnie d'assurances contre l'incendie.
YVETOT - Voir Yvetot et mourir ! (v. Naples et Séville).


Gustave Flaubert, Dictionnaire des idées reçues, initié en 1847, paru en 1911 (posthume).

3.5.11

Le Corps de mon ennemi

Au matin, je vis avec joie sous l'arbre le corps de mon ennemi.


William Blake, repris dans le titre et la fin du film d'Henri Verneuil, Le Corps de mon ennemi, 1976, avec Jean-Paul Belmondo (LE corps du cinéma français), Bernard Blier (l'Ennemi), Marie-France Pisier (bien joli corps dont l'âme repose depuis peu) et Claude Brosset (corps androgine).

2.5.11

Où mène cet enfoncement


J’ai remarqué qu’une vaste trappe, à l’arrière, enfonçait vers les sous-sols. Mais il n’avait pas de veste, et dans les sous-sols on ne va pas sans veste. J’y vais. Je vais voir où mène cet enfoncement (il y a partout de ces enfoncements, mais nul qui mène au même endroit). Je regarde la photo : pleurait-il cet homme, où c’est moi qui invente ?

François Bon, "roman-photo | l’homme qui pleure", le tiers livre {http://www.tierslivre.net/spip/spip.php?article2527}, 2 mai 2011.